Au cours de ces quatre ans, je me suis vraiment sentie intégrée!

Rencontre avec Pascaline Fuertes, ancienne élève en Bac Pro SAPAT au Lycée Costa de Beauregard, du CNEAP, à Chambéry.

le Dimanche 22 jan 2023

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Bonjour Pascaline, nous nous sommes rapidement croisées alors que tu finissais ton Bac Pro SAPAT à Chambéry et plus récemment, tu m’as interpelée car tu ne voyais peu de témoignages d’anciens passés par les services à la personne (ce n’est pas faute d’essayer ! Avis aux témoins...) et encore moins ciblés sur les métiers de l’accompagnement que tu prépares au niveau License.

 

Peux-tu nous raconter ton parcours ?

 

Pascaline : Je m’appelle Pascaline Fuertes. Je suis née en Savoie et j’ai grandi dans le Doubs en Franche-Comté avec ma sœur jumelle, avant de revenir dans les Bauges, vivre avec mon père au Chatelard. A partir de la 6e, j’ai commencé à décrocher en général, car j’avais besoin de concret et déjà une petite idée du métier que je voulais faire. A cette époque, je voulais devenir puéricultrice et m’occuper d’enfants, mais surtout je voulais apprendre des choses qui me serviraient pour mon futur métier ! J’ai finalement pu entrer en voie professionnelle a compté de la 4e, niveau à partir duquel je suis entrée à l’internat. Un internat choisi pour gagner en autonomie, prendre confiance en moi et acquérir une grande ouverture; un mode de vie que j’ai très vite adoré, encore plus quand j’ai intégré le Bocage, en classe de 3e ! Une fois lancée, j’ai eu mon brevet avec mention Assez Bien et tout s’est naturellement enchaîné pour confirmer mes choix jusqu'au Bac avec la même mention. Je me suis tellement plu dans ces études que ces 4 ans ont été mes meilleures années !

Au contact d’humains, on reste des humains.

Que fais-tu aujourd'hui ?

 

Pascaline : Aujourd’hui je suis en 2e année de mon diplôme d’état ASS (je fais ma première année en 2ans, c’est un aménagement pour avoir un rythme de travail adapté à ma santé) à la Croix Rouge, à Ollioules. Mon seul regret, c’est qu’au cours de notre formation SAPAT, on nous donne beaucoup à voir sur la partie soin, mais peu sur la partie accompagnement. Nous avons eu beaucoup de formations, mais pas assez d’information sur ces métiers, ce qui est dommage car sur les 12 personnes de ma promo, au final, peu sont restés dans les services à la personne. Il y a eu beaucoup de déperdition ! D’une part Parcoursup qui vient d’ouvrir en décourage certain, d’autre part, ce qui nous est montré est un choix trop restreint ! Au départ nous étions 50 élèves. On a déjà perdu 50% de la promo. Les préjugés ont la vie dure. Soit on croit que l’on va sauver le monde, avec notre cape de super héros, en aidant les gens, soit on prend le costume du bourreau qui va arracher les enfants aux familles. La réalité est plus complexe et le métier d’AS ne donne pas envie si l’on ne prend pas le temps d’échanger avec quelqu’un du métier ! Il y a plein de façon d’exercer : au département, en prison, à l’hôpital, en association… A chacun de trouver son domaine !

Dans notre formation, qui est une formation de terrain, nous faisons la première année, une alternance 8 semaines/ 8 semaines. En 2e année, c’est 6 mois de stage et on gagne en autonomie. Nous avons des cours de sociologie, de psychologie, de communication non violente (CNV), nous apprenons à désamorcer des situations. Nous travaillons beaucoup nos écrits, nos oraux aussi et en équipe. Nous avons d’ailleurs un tuteur et des référents et beaucoup de temps de parole pour discuter des violences rencontrées, des choses qui nous ont heurtées, de notre positionnement professionnel. C’est une formation qui nous change, bouscule et pour laquelle il faut avoir les épaules assez larges pour exercer. Au contact d’humains, on reste des humains. Il faut connaitre ses limites et sans cesse les travailler.


Quelles sont les missions des assistantes sociales que tu as rencontrées ?

 

Pascaline : On pense souvent que l’AS passe son temps en pause-café alors qu’en réalité, on cherche les pauses car on passe beaucoup de temps en entretiens, à l’écoute des femmes, des familles, de personnes fragiles, très souvent dans une grande précarité matérielle et financière. Notre mission est de les orienter vers les bons partenaires – personnels de santé, associations, organismes, de les aider, de les mettre en sécurité, de les informer sur leurs droits, de veiller à trouver les bons mots, le bon tempo, de déterminer le niveau d’emprise de la personne, de sa mise en danger, du contexte global, d’où l’importance de travailler en équipe, surtout quand on débute !

 

Sais-tu dans quel domaine tu aimerais travailler?

 

Pascaline : Moi, je voudrai travailler en polyvalence de secteur, au département pour avoir à faire à tous les publics ! J’ai eu le déclic lors d’un stage. Je travaillais à la maison des services au Chatelard, en zone rural et j’ai adoré ce rôle d’accompagnant. A termes, j’espère avoir des responsabilités et devenir cadre de santé ou responsable d’unité.

 

Qu'est-ce qui te plait dans ce métier ?

 

Pascaline : Ce qui me plait dans ce métier c’est le contact humain, la possibilité de travailler dans différentes structures, auprès de plein de publics très différents, en équipe pour veiller au bien-être et à la sécurité de tous.

 

Comment as-tu connu le lycée ?

 

Pascaline : Quand mon père a déménagé, il s’est renseigné sur le Bac Pro SAPAT et a rencontré Véronique Serre. Nous avons discuté ensemble de mon projet et j’ai naturellement rejoint le lycée Costa de Beauregard. C’était limpide depuis toute petite ! En même temps, mon père et ma mère sont ambulanciers. Je suis quelque part tombée dans la marmite enfant ! Par chance, tout mon entourage m’a toujours soutenu dans mes choix.

 

Où as-tu fait tes stages ?

 

Pascaline : Grâce à Mme Darchicourt, j’ai fait un de mes stages en maternel, au Petit Bocage. Je me suis sentie très privilégiée de le faire dans cette école privée.

En License, j’ai fait un premier stage au département du Var, à Draguignan avec une super équipe, j’ai adoré, le 2e dans un UPV intersyndical du Var et récemment au CAMSP avec des professionnels extra. Dans ce métier, on est vite amené à tisser des liens très forts. C’est de plus en plus dur de trouver des stages car les subventions s’amenuisent et nous devons être payés en 2e année. Les structures, déjà en manque de personnel, ne peuvent plus nous accueillir pour nous former.

Les classes à petits effectifs permettent une relation très individualisée.

Qu'est-ce qui t’a plu au Lycée ?

 

Pascaline : A l’internat comme au lycée, je me suis proposée pour être déléguée. Concrètement, à l’internat j’aidais Christelle à vérifier les chambres, à réarmer les portes après les examens d’alerte incendie. Thierry et Christelle, nos surveillants sont des éducateurs hors pairs, proches des jeunes. Au lycée, j’ai pu m’investir également. J’ai adoré l’ambiance salésienne et la confiance que l’on nous donnait. Je me suis vraiment sentie intégrée. Au cours de ces 4 années, j’ai découvert ma maladie et tout le monde était là pour faire au mieux, pour me soutenir mais aussi pour aménager mon temps ou me permettre de vivre les mêmes expériences que mes camarades, comme lors de notre voyage en Catalogne avec Erasmus ! J’ai adoré les cours professionnels, on apprenait à préparer des biberons, changer les couches d’un petit, en économie, à remplir un chèque, lire une fiche de paye, en biologie, le corps humain. C’était très concret, utile pour le quotidien.  Nous avions des classes à petits effectifs du coup la relation était très individualisée.

Même avec un Bac Pro, on peut faire de longues études!

 

Que t'a apporté le Lycée ?

 

Pascaline : Grâce aux enseignants qui nous poussent, mes années au Lycée m’ont permis de gagner confiance en moi et d’être à l’aise avec les autres. Je repense à madame Créton qui m’a beaucoup soutenue et encouragée. Tout cela me montre que malgré un Bac Pro, on peut faire de longues études, on peut y arriver !

A 18 ans, c’est dommage de ne pas être heureux !

Quels conseils donnerais-tu aux futurs étudiants ?

 

Pascaline : Je les encourage à bien s’écouter et à faire ce qu’ils ont envie de faire. On a de la chance, on peut plus facilement se réorienter à tout moment. Je les invite à bien réfléchir à leur projet professionnel, à le murir et à foncer car c’est de leur vie dont il est question et qui en dépend. A 18 ans, on est jeune, il faut profiter de ces années d’étude et bien les vivre car ce n’est pas un calvaire, c’est dommage de ne pas être heureux !

 

As-tu un souvenir d’une de tes expériences que tu aimerais partager ?

 

Pascaline :  lors d’un de mes stages, j’ai pu discuter avec une grand-mère qui m’a beaucoup émue. J’ai pris le temps de l’écouter. A mon départ, elle a pleuré et m’a remerciée de lui avoir consacré ce temps. Aujourd’hui, c’est ce que je veux faire, être à l’écoute des autres !

 

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