Le Bocage, c’était le début de la liberté.

Rencontre avec Eric Veyret, ancien élève en CAP puis BEP Production Horticole au Lycée Costa de Beauregard, du CNEAP, à Chambéry.

Eric Veyret (3) Eric Veyret (3)  

 

Bonjour Eric,

 

C'est un hasard chanceux qui nous a permis de nous mettre en relation avec toi, par le biais d'une enseignante qui t'aide sur les marchés le week-end !

 

Peux-tu s'il te plait te présenter en quelques mots?

 

Eric: Bonjour, je m’appelle Eric, j’ai la cinquantaine et travaille comme maraicher et arboriculteur dans la Drôme, à Albon. Depuis 1997, avec mon épouse Marielle, nous exploitons une trentaine d’hectares de terre répartis entre légumes, fruits et terres arables, auparavant dédiées aux céréales. Je suis entré au Bocage en même temps que Louis de Lansalut (directeur du lycée de 1983 à 2015), en CAP horticulture puis en BEP arboriculture. J’ai terminé mes études par trois années en MFR et un BTS Protection des Végétaux avant de faire mon armée, 4 années comme technicien en Coop et de m’installer dans l’exploitation que mon épouse avait lancée avec son père, Jean Vallon.

Nous vendons 85% de notre production en détail sur les marchés.

Quelles sont tes missions ?

 

Eric : Je m’occupe un peu de tout, avec ma femme, sauf des plans de légumes que j’achète à un producteur avec qui nous planifions semaine après semaine ce qui sera planté. Ce qui caractérise la SARL du Creux, c’est la diversité de nos productions. Sur les 7 hectares de verger, nous produisons des fraises, abricots, cerises, prunes, pommes, poires mais aussi kiwis, nashis (ou poires japonaises), figues, coings et autres noisettes et amandes. Sur les 2 hectares de légumes, nous cultivons au printemps-été, des pommes de terre primeur, des courgettes, des concombres, des haricots, des tomates de bouche et des variétés anciennes (cœur de bœuf, noire de Crimée, andines cornues, etc.), mais aussi des aubergines, poivrons, oignons et salades ; en automne-hiver, l’étal est composé de blettes, céleris, fenouils, choux, rutabaga, navets, potirons, butternuts, potimarrons, épinards… Nous vendons 85% de notre production en détail sur les marchés, dans un rayon de 150 kilomètres, ce qui représente cinq marchés par semaine en période estivale et deux en hiver, pour une moyenne de 85 tonnes de marchandises vendues à l’année ! Le reste de la production part en transformation, sous forme de jus de fruits, coulis de tomates, bocaux de légumes et soupes.

Mon système de production n’est ni conventionnel, ni bio, mais représente une 3e voie.

Tu as choisi l'agriculture raisonnée, pourquoi ?

 

Eric : Après mes années au Bocage, j’ai fait trois années en MFR puis un BTS en protection des végétaux. C’est là que j’ai découvert l’importance des auxiliaires. Mon système de production n’est ni conventionnel, ni bio, mais représente une 3e voie. En agriculture raisonnée, pour lutter contre les maladies et les ravageurs, tout en respectant l’environnement, j’ai recours à d’autres recettes : par exemples, l’usage de la fumure organique plutôt que chimique pour toutes les plantations et les légumes, ou l’implantation de haies composées d’une multitude d’essences différentes qui fournissent abri et nourriture aux auxiliaires de culture, ou encore l’installation de nichoirs qui attirent les oiseaux et autres insectes. Il m’arrive aussi d’utiliser des pièges à phéromones sexuelles pour perturber certains ravageurs et limiter leur accouplement. Sous serres, j’utilise la Protection Biologique Intégrée (PBI) grâce à des lâchers d’auxiliaires d’élevage, comme les larves de coccinelles, d’acariens ou de mouches, qui vont dévorer les ravageurs.

 

Qu'est-ce qui te plait dans ce métier ?

 

Eric: Ce qui me plait dans ce métier, c’est d’être dehors et le contact avec notre clientèle sur les marchés ! Au fil du temps, beaucoup de nos clients sont devenus des amis fidèles.

 

Comment as-tu connu le Lycée Costa de Beauregard et cette formation?

 

Eric : Après avoir redoublé ma 6e et ma 5e, le directeur de mon collège à la Tour du Pin a conseillé à mon père de trouver ce qui pourrait m’intéresser. Mon père était plombier, une voie que je ne voulais pas suivre. J’aimais la soudure, mais ma myopie ne me permettait pas de me professionnaliser dans ce domaine. J’aimais être dehors, dans les champs. On m’a orienté vers des lycées agricoles : celui de la Tour du Pin et du Bocage, à Chambéry, tenu par des prêtres, à l’époque, le Père Cartier et Robert Fritsch. Lors des inscriptions, j’ai passé les épreuves de dictée, de calcul mais ce sont celles en extérieur qui m’ont permis de rentrer à la Fondation du Bocage !

Nous aimions être punis, car on apprenait plein de choses !

Qu'est-ce qui t'a plu au lycée ?

 

Eric : J’ai aimé l’internat. C’est au Bocage que j’ai appris à vivre loin de la maison et fait mes premières expériences. Lorsque je faisais des bêtises, monsieur de Lansalut nous prenait dans son bureau. Nous avions alors un temps limité pour répondre à 10 questions. On apprenait plein de choses et finalement, nous aimions être punis car nous passions de bons moments avec lui. Il était aussi cultivé que le Père Fritsch en botanique. C’était une mine d’or ! J’aimais bien aussi le temps que nous passions au foyer à faire des crêpes. Les ventes nous ont permis d’acheter une table de ping-pong. On venait aussi en permanence le samedi arroser les plantes.

 

Que t'a apporté le lycée ?

 

Eric : Je ne saurai pas par où commencer, mais plein de choses… Le Bocage, c’était le début de la liberté. Nous étions 3 à venir de la Tour du Pin. J’ai pu aussi continuer la gym, à l’internat avec L’Alerte Chambérienne.

 

Où as-tu fait tes stages ?

 

Eric : En CAP, nous n’avions pas de stage à faire. Le seul que j’ai suivi, c’était chez Monsieur Jean Pin, un arboriculteur de La Motte-Servolex.

Il ne faut pas avoir peur de se tromper et de changer de métier.

Quels conseils donnerais-tu aux futurs étudiants ?

 

Eric : A ceux qui ne savent pas ce qu’ils veulent faire, comme c'était mon cas, vous pouvez essayer. Il ne faut pas avoir peur de se tromper et de changer. Le boulot, cela dure toute une vie, alors autant trouver ce que l’on aime faire. Aujourd’hui, je les inviterai aussi à considérer tous les métiers manuels qui manquent de main d’œuvre, car en France, trop souvent les gens sont finalement mieux payés à ne rien faire. Dans notre secteur, nous avons beaucoup de difficulté à trouver du personnel qualifié.

 

Quelle est ta plante préférée?

 

Eric : Les fraises, il en existe pour tous les goûts avec plein de variétés et on peut les cultiver d’avril à octobre avec les remontantes.

 

 

Merci Eric pour ton témoignage!

Bonne continuation à toi et on espère à bientôt pour goûter tes succulentes " fragoria vesca" et tomates !

 

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Article réalisé avec le concours de l'Association des Amis et Anciens du Bocage.