Béatification de Camille Costa de Beauregard : dans les coulisses de l’enquête pour vérifier que le miracle a bien eu li

Retour sur une visite peu ordinaire à Chambéry. Celle d’un prêtre romain qui a suivi une partie du processus de béatification de Camille Costa de Beauregard. Il explique ce qui a été fait pour vérifier qu’un miracle a eu lieu.

le Dimanche 13 avr 2025

Don Cameroni Don Cameroni  

Don Pierluigi Cameroni, postulateur général romain, a géré le dossier de béatification de Camille Costa de Beauregard. Photo Le DL /T.L.

 

Pas de garde suisse pontificale comme au Vatican. Pas de cérémonial. Avec son col romain et son sourire franc, il attend tout seul dans les couloirs de la maison diocésaine de Chambéry, son ordinateur portable sous le bras. Il pourrait presque passer inaperçu et pourtant il est venu de Rome avec le reliquaire pour la béatification de Camille Costa de Beauregard. Pierluigi Cameroni est postulateur général romain de la Congrégation salésienne. Il travaille en lien avec le Vatican et a supervisé tout le dossier pour la béatification de Camille Costa de Beauregard qui aura lieu le 17 mai prochain.

Il vient d’amener en main propre un reliquaire spécial pour cet événement : c’est un coffret créé par un artisan italien où va être insérée une relique. Il s’agira d’un morceau d’os du pied de Camille Costa de Beauregard.

Ce reliquaire sera dévoilé lors d’une procession à Chambéry, la veille de la béatification, vendredi 16 mai, du Bocage à l’église Notre-Dame.

Une incroyable enquête et de nombreux procès

C’est l’aboutissement d’une incroyable enquête où rien n’a été laissé au hasard : « J’ai accompagné toute la phase de vérification du miracle entre 2021 et 2024. » Dans sa langue natale, en italien, il se souvient de sa première rencontre, le premier procès en béatification, c’était à Myans, en pleine pandémie en 2021 : « Cent dix ans après on a retrouvé tous les documents originaux. Ils sont d’une grande qualité et précision, c’est la première chose qui m’a frappé. Six ophtalmologues français et italiens ont analysé le cas du jeune René. En 1910, accueilli au Bocage, il est miraculeusement guéri à l’œil , après une neuvaine de prière à Camille Costa de Beauregard : ce sont neuf jours de prières. La guérison a été observée au huitième jour. Les spécialistes ont convenu à l’unanimité que la guérison était inexplicable d’un point de vue scientifique. Même avec l’évolution de la médecine, de nos jours, il serait impossible de guérir cette lésion optique. »

Au total, 20 spécialistes impliqués

Pierluigi Cameroni emporte alors les documents à Rome pour entamer la phase romaine du procès : « C’était en mars 2023. Sept nouveaux ophtalmologues examinent le cas et confirment la guérison complète, durable et inexplicable. Pour eux, il n’y a pas de doute. René est devenu couturier, c’est pour dire comme sa vue n’a pas été altérée. C’est une histoire incroyable. »

En octobre 2023, place à la troisième phase du procès en béatification : « Sept théologiens romains examinent le dossier. C’est à eux de définir en quoi Dieu et les prières ont joué un rôle dans cette guérison. »

En janvier 2024, quatrième phase du procès : à Rome, 18 cardinaux et évêques étudient le cas, « ça a été rapide car tous les documents ne laissent que peu de place au doute et sont très précis ».

Une déclaration de miracle est alors éditée : la Positio super miro (du latin, Position super incroyable) compte 320 pages, elle est remise au pape qui promulgue le miracle en mars 2024. « Dans tout ce processus, tout est très sérieux et vérifié. À chaque étape un avis contradictoire peut tout interrompre. Arriver jusqu’au miracle est extraordinaire », s’enthousiasme Don Pierluigi. En 15 ans de carrière, il ne compte pas les innombrables dossiers arrêtés en cours de route pour au final quatre miracles reconnus.

Messe de béatification de Camille Costa de Beauregard à Chambéry, le 17 mai, à la cathédrale de Chambéry.

Un coup de pub pour redorer l’image de l’Église ?

Si cette béatification à Chambéry soulève la ferveur des plus croyants, elle peut être remise en doute par certains. Entre les affaires Betharram et abbé Pierre, l’Église n’en profite-t-elle pas pour redorer son image ? Peut-être, mais une certitude demeure, rien n’a été improvisé ou pris à la légère dans le processus de béatification. En effet, bien avant la phase de vérification du miracle (2021-2024), une autre enquête capitale a été diligentée pour s’assurer que Camille Costa de Beauregard n’a commis aucun délit. Cette enquête-là a été initiée dès 1925 pour aboutir en janvier 1991 par un décret de vénérabilité. Dossier et témoignages à l’appui, l’Église reconnaît la vie vertueuse du prêtre chambérien.

Et pourquoi ne pas en faire un Saint ? Pour la canonisation, il faut soit un minimum de deux miracles reconnus, soit être un martyre. Dans le cas de Camille Costa de Beauregard, un seul miracle a été reconnu, il sera donc béatifié pour devenir Bienheureux.

 

Article du Dauphiné Libéré, par Thomas Lanier.