Avoir confiance en soi, accorder sa confiance aux autres, garder confiance en Dieu… On emploie beaucoup la notion de confiance aujourd’hui. Mais sait-on vraiment ce qu’elle signifie ? Concrètement, qu’est-ce que ça change dans la vie de faire confiance aux autres ? Et à Dieu ? Le temps de l’Avent est l’occasion de méditer son sens spirituel et d’en saisir les enjeux concrets.
Première partie : le premier bonheur selon Jean Bosco
Les écrits de Don Bosco l’inspirent et l’accompagnent au quotidien dans sa mission d’éducatrice. Sœur Anne-Flore Magnan vit à Bruxelles, en Belgique, où elle dirige un internat à vocation sociale. L’Etat ou bien des familles leur confient, à elle et ses sœurs de communauté, des jeunes en grande difficulté. La mission d’Anne-Flore Magnan est d’établir avec chacun une relation de confiance pour aider ces jeunes à grandir.
« Le premier bonheur d’un enfant est de se savoir aimé »
« Ça peut paraître évident, parce qu’on peut l’entendre presque partout », admet Sœur Anne-Flore Magnan mais « nous, au quotidien on rencontre des enfants qui n’ont pas eu cette chance-là ». La chance de se savoir aimé : les Salésiennes de Don Bosco le constatent, « les personnes qui grandissent sans ce cadre de référence… se construisent sur une forme de vide », qui conduit à une « angoisse ».
Il y a dans l’amour comme dans la confiance l’idée que si on n’en a jamais reçu pour soi, on ne saura pas en donner en retour. Or, la foi chrétienne conduit à croire que le Christ « nous aime avant que nous l’aimions », précise Sœur Anne-Flore Magnan.
Deuxième partie : Faire vibrer la corde du bien
« Il y a en chaque jeune un point accessible au bien. Le devoir d’un éducateur est de trouver cette corde sensible et de la faire vibrer. »
« C’est l’une de mes citations préférées de Jean Bosco ! » confie Sœur Anne-Flore Magnan. Difficile, pourtant, de l’appliquer concrètement, quand par exemple quand un jeune se montre violent. Justement, pour la religieuse, cette phrase résume « la mission de chaque éducateur ». Pour permettre à un enfant de découvrir le bien dont il est capable, les talents qui sont les siens, il a besoin d’un adulte pour le lui faire remarquer.
« On ne peut savoir qu’on a du talent, on ne peut savoir qu’on est intelligent, qu’on peut être gentil, généreux, que quand quelqu’un nous le dit. Et parfois il faut le répéter plusieurs fois ! » Au cœur de la relation de confiance, il y a ce regard bienveillant, prêt à déceler en l’autre une qualité ou un talent.
Troisième partie : Affection et éducation
« Sans affection, pas de confiance. Sans confiance, pas d’éducation. »
C’est l’une des citations de Jean Bosco les plus connues. « Elle dit bien la pédagogie salésienne et notre spiritualité », résume Anne-Flore Magnan. Une pédagogie basée sur la prévention, qui passe par la qualité de la présence de l’adulte auprès du jeune. En français, on traduit le terme qu’utilisait Jean Bosco, « amorevolezza », par « bienveillance ». Mais le mot italien exprime mieux cette idée que décrit Anne-Flore Magnan : « D’entrée de jeu, le jeune doit pouvoir sentir que l’adulte veut son bien. » C’est « la base pour qu’on en arrive à question de confiance ».
Quatrième partie : Se savoir aimés
« Il faut non seulement que les jeunes soient aimés et qu’ils se sachent aimés. »
Il existe de multiples façons de montrer à l’autre qu’il est aimé. Par exemple, il suffit parfois de s’intéresser à ce qui intéresse l’autre. Un jour, pour tenter de communiquer avec un jeune, Anne-Flore Magnan lui a posé des questions sur les Pokémon : elle n’y comprenait pas grand-chose mais lui était passionné par ces jeux vidéo. « Ce qui le touchait lui, c’est le fait que j’essaie de le rejoindre sur un terrain qui était le sien. Ça peut paraître futile et absurde, mais c’est dire au jeune ce qui est important pour toi a du sens pour moi. »
Dieu agit un peu de la même façon avec nous : il s’intéresse à nous ! Anne-Flore Magnan en a fait l’expérience. « Toutes les zones d’ombres que j’ai voulues cacher à Dieu, toutes les blessures que je peux porter, toutes les difficultés… Plus je mets du Dieu à dire à Dieu : Ok, on va les regarder ensemble, plus c’est là où Dieu vient me consoler. » Les blessures les plus profonde sont souvent les plus difficiles à confier. Mais la religieuse en est convaincue, plus c’est douloureux, plus Dieu console, plus « sa grâce surabonde ».
Cinquième partie : Cherche à te faire aimer
« Cherche à te faire aimer, fais en sorte que tous ceux à qui tu parles deviennent tes amis. »
À l’époque où vivait Jean Bosco, le système éducatif reposait sur « le tout répressif » – système qui, « finalement, par certains aspects revient aujourd’hui, avec le tout sécuritaire tout répressif », observe la religieuse. Or, « si l’on se base sur un enjeu de confiance et de relation, il y a plus de chance d’advenir à quelque chose qui soit bon pour les personnes ». Mais le pardon, la tendresse, l’amitié, en bref la confiance, n’est possible que grâce à la prière. « La prière est la source », confirme Anne-Flore Magnan.