Un cœur toujours ouvert

On a déjà vu ici comment le père Camille Costa de Beauregard savait réagir, avec douceur et tendresse, aux bêtises plus ou moins involontaires de ses enfants.

le Vendredi 01 déc 2023

Camille Costa de Beauregard et les orphelins color Camille Costa de Beauregard et les orphelins color  

 

Mais parfois, les actes commis étaient bien plus répréhensibles, comme l’atteste ce choix de témoignages.
Voyons quelle était sa conduite en pareils cas.

Un simple entretien

"Il nous faisait appeler dans son bureau. Là, il savait trouver les mots qui allaient droit au cœur et l’on sortait apaisé, promettant de devenir meilleur".
"Dès que l’un d’entre nous lui donnait des inquiétudes... Il le prenait à part chez lui et il savait si bien ouvrir les âmes et les  guérir qu’on en sortait tout transformé".

Un petit mot

Une fois où Camille avait appris le lieu de refuge d’un garçon, il lui avait écrit pour lui reprocher sa conduite. N’ayant reçu de lui aucune réponse, il lui en avait adressé une seconde : "Tu ne m’écris plus. Tu me crois fâché contre toi, mais tu sais bien que je n’ai aucune rancune contre mes enfants. J’attends donc un petit mot de toi, mon bon et très aimé François".

Des foyers d’accueil

Mais il y avait des cas ou malgré ses efforts, le père Camille faisait renvoyer un contrevenant ou constatait un jour qu’il s’était enfui du Bocage.
Il ressentait alors une peine immense à ce départ sans un regret, sans un merci, sans un adieu. Et pourtant, c’était bien ce même gamin qu’il avait recueilli quand il s’était retrouvé sans toit, sans argent et sans famille. C’était bien lui qui l’avait embrassé à son arrivée, consolé, soigné quand il était malade, avec qui il avait partagé tant de bons moments...
Mais Camille avait à l’extérieur son réseau d’anciens, liés entre eux par une solide affection, qui le renseignaient sur les lieux où s’étaient réfugiés les prodigues. D’ailleurs, c’était souvent à la porte de l’un de ces anciens qu’ils avaient frappé dans l’attente d’un emploi, car ils savaient qu’ils y trouveraient le gîte et le couvert. Mais ce qu’ils ignoraient, c’est que Camille réglait souvent en secret les frais de leur hébergement. Au fil des jours et des conversations, leurs hôtes écoutaient les raisons des coupables, leur expliquaient les dangers et les difficultés à affronter pour assouvir leur soif de liberté. Ils leur rappelaient la paix sereine qui régnait à la maison... Et les prodigues, les yeux rougis de larmes, rentraient au Bocage, affectueusement embrassés par leur père.

Un drame évité

Voici un cas, plus poignant encore, d’un jeune de 19 ans qui avait quitté son patron et qui, n’ayant plus de salaire ni de logement, avait accepté, pour survivre, un emploi très dur consistant à extraire des pierres d’une rivière asséchée. Il était si épuisé qu’il avait songé au suicide. Mais, pensant à Camille et à son amour paternel, il n’avait qu’un désir : retourner au Bocage.
Comme son chantier était proche d’un chemin emprunté par les orphelins lors de leur promenade, il avait fait un tas de ses habits et les avaient placés au creux d’un rocher au bord de ce chemin. Et quand ses camarades reconnurent ses vêtements marqués à son nom, ils en informèrent Camille qui fit aussitôt atteler une voiture et se rendit sur les lieux. Il trouva les vêtements et, voyant une équipe d’ouvriers au bord de la rivière, il eut vite fait de reconnaître son enfant. Il se précipita vers lui pour l’embrasser et lui faire d’affectueux reproches, et, après avoir donné quelques pièces d’or à son patron pour la rupture de son contrat, il le fit monter dans la voiture.
En rentrant au Bocage, il dit aux orphelins : "Je vous ramène un de vos camarades qui a bien souffert. Il faudra l’aimer et le soigner doublement pour le lui faire oublier.".

Autant d’exemples prouvant comme un père aussi aimant savait pardonner à ses enfants.

 

Françoise Bouchard

 

Sources :
Livre d’ Ernest Costa de Beauregard : Une Ame de Saint, p 160 à 170
Livre du père Fritsch sur Camille Costa de Beauregard, p 282 et
suivant
summarium page 212 et 396