Évangile selon saint Matthieu 9, 35 à 10,1.5a. 6-8. Livre du prophète Isaïe 30, 19-21. 23-26. Psaume 146.
ÉVANGILE : « Voyant les foules, Jésus fut saisi de compassion » (Mt 9, 35 – 10, 1.5a.6-8)
Alléluia, Alléluia. Le Seigneur est notre juge, il nous donne des lois,
le Seigneur est notre roi : c’est lui qui nous sauve. Alléluia. (Is 33, 22)
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
En ce temps-là,
Jésus parcourait toutes les villes et tous les villages, enseignant dans leurs synagogues, proclamant l’Évangile du Royaume et guérissant toute maladie et toute infirmité.
Voyant les foules, Jésus fut saisi de compassion envers elles parce qu’elles étaient désemparées et abattues comme des brebis sans berger.
Il dit alors à ses disciples : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux.
Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. »
Alors, Jésus appela ses douze disciples et leur donna le pouvoir d’expulser les esprits impurs et de guérir toute maladie et toute infirmité.
Ces douze, Jésus les envoya en mission avec les instructions suivantes :
« Allez vers les brebis perdues de la maison d’Israël.
Sur votre route, proclamez que le royaume des Cieux est tout proche.
Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, expulsez les démons.
Vous avez reçu gratuitement : donnez gratuitement. »
– Acclamons la Parole de Dieu.
Homélie
Chers amis, il y a un constat que j’entends assez régulièrement à travers les personnes que je côtoie régulièrement, soit à la Paroisse, soit au Bocage en discutant avec les jeunes : le moins que l’on puisse dire, c’est que notre monde ne va pas très bien !
Est-ce une nouveauté ? Non ! Était-ce mieux avant ? Pas si sûr !
Déjà Jésus en fait le constat, comme nous venons de l’entendre dans l’évangile :
« Voyant les foules, il eut pitié d'elles parce qu'elles étaient fatiguées et abattues comme des brebis sans berger. »
Lassitude, blessures, découragement, isolement grandissant, peur de l’avenir… : voilà bien ce que vivent beaucoup de personnes à notre époque.
Il est vrai que la politique politicienne actuelle ne nous aide pas vraiment !
Les repères familiers et bien souvent, ceux de la famille sont considérablement bousculés ! Ni les illuminations de nos rues ni les commerciales ‘black Fridays’ à outrance n’arrivent à vraiment satisfaire le cœur des hommes et des femmes.
Pourtant (et j’en suis profondément persuadé) l’espérance est toujours présente ! En ce mois de décembre, période de l’Avent, période où nous nous préparons à fêter la naissance de Jésus, et aussi à la revenue en gloire du Christ, c'est au milieu de ces inquiétudes que le Christ nous rejoint aujourd'hui, nous qui sommes réunis dans cette chapelle du Bocage !
À la création du Bocage, en l’année 1868, était-ce plus facile ? Il est certain que Camille a dû batailler pour que sa vision et l’œuvre qu’il a suscitée, se développe et grandisse.
Cette chapelle, (qui sera bientôt rafraichie) a entendu les cris de joie des enfants du Bocage et les chants d’intercessions vers notre Dieu depuis plus de 150 ans,
Savez-vous que cette joie est toujours présente ! Par exemple : jeudi dernier (5 décembre), nous avons eu, ici dans cette chapelle, une belle messe de l’Aurore, avec des jeunes de l’Internat. La joie était palpable ! Votre présence ce matin est aussi source d’une grande joie !
L’espérance est toujours présente, et pourtant, il y a une toujours cette urgence ! Que vient nous dire Jésus ?
Tout d'abord qu'il nous comprend et qu'il a pitié de nous, de cette pitié forte qui recrée et qui sauve : « Voyant les foules, Jésus eut pitié d'elles ! »
Jésus voit, il agit, il nous bouscule ! Le Christ ne se contente pas de nous assurer de sa présence ; il nous appelle à donner de notre personne, il nous invite à relever la tête, à regarder au-delà de nos misères, personnelles, familiales, il nous demande d'ouvrir les yeux, d’oser voir et que voir :
La moisson comme la mission est immense, encore aujourd’hui !
Vous allez peut-être me dire que la moisson comme la mission semble disproportionnée à nos forces ! Et alors ! Est-ce un problème ? Croyez-vous que Camille a baissé les bras devant l’ampleur de la tâche ? Pas du tout !
À l’automne 1867, au moment de l’épidémie de choléra, l’urgence était aussi immense. Pourquoi le Bocage va être une extraordinaire réponse à cette crise, au besoin d’accueillir ces enfants démunis de tout ?
La réponse est simple : tout simplement parce que Camille a fait preuve d’audace : il a vu, puis il a agi, il s’est engagé !
À l’annonce de la béatification de Camille, on me pose souvent cette question : comment devient-on saint ?
Évidemment, la réponse est multiple. De fait, un saint ne se révèle souvent qu’après sa mort ! Cependant, il y a un mode opératoire similaire pour tous les bienheureux, comme pour tous les saints !
À Chambéry, en 1868, tous ont vu les mêmes drames, tous ont vu le sort terrible de ces enfants orphelins. Camille a vu, lui aussi, il a été touché au plus profond de son cœur et il a su trouver un moyen, une intuition et une solution pour venir en aide à ces enfants, afin de leur redonner une famille, un métier, un sens, un avenir.
Alors, il a “mouillé sa chemise“ ou plutôt sa soutane. Le résultat, sa détermination et le don de lui-même ont donné un fruit extraordinaire dont nous sommes les héritiers aujourd’hui !
Ce qui est certain, c’est que Camille n’a pas agi seul ! Sa vision a été possible, à travers les joies et les galères, grâce à des personnes de toutes conditions qui ont accepté de l’accompagner, humainement, spirituellement, financièrement… : des éducateurs, des Prêtres, des Sœurs, des médecins, des familles, des artisans, des horticulteurs… des personnes anonymes ou connues… riches ou pauvres… Tous ont contribué au développement de la fondation que nous connaissons aujourd’hui.
La vision et la détermination de Camille, nous invite, nous aussi, à voir, l’urgence, à agir, à réagir et à nous engager, selon nos moyens, nos possibilités ! Ne restons pas les bras ballants !
Je le dis avec humour, et pourtant, je le crois : parmi les personnes que je côtoie (et sans doute y en-t-il dans notre assemblée), il y a de la graine de saint, de la graine de bienheureux, de bienheureuses, sans même le savoir ! C’est dans le cœur de Dieu que cela existe !
Évidemment, le Seigneur ne nous demande pas d'être présents partout à la fois. Mais il nous demande d'être vraiment présents là où nous sommes, là où il nous a placés gratuitement pour que, modestement, nous portions du fruit.
Je termine avec un dernier point ; Dieu ne demande que des moissonneurs, car c'est Lui-même qui a fait les semailles dans le cœur des hommes ; c'est Lui qui peut faire grandir chez un homme, une femme, l'espérance du salut et de la vraie liberté ; c’est Lui qui nous conduit et nous guide sur le chemin ; c'est Lui seul qui sauve le monde ! Nous sommes seulement de modestes et pourtant de nécessaires ouvriers pour Sa moisson.
Chers frères et sœurs, chers amis, merci d’être présents ce matin. Mesurons tout ce que Camille a pu et su faire et l’héritage qu’il nous confie ! Demandons au Seigneur la grâce, le courage et l’audace de continuer l’œuvre qu’il a initiée afin que, nous aussi, nous puissions porter du fruit, et un fruit qui demeure.
Ainsi soit-il !