Plaidoyer contre l’indifférence politique

La chronique des Salésiens: cette semaine, Sœur Catherine Fino revient sur le projet de loi de bioéthique et sur certaines propositions qui enfreignent des barrières éthiques lourdes.

le Mercredi 16 juin 2021

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Je voudrais attirer l’attention sur la relative indifférence dans laquelle se passe le vote de la loi de bioéthique. Le débat reste focalisé au sujet de la PMA pour toutes, témoignant d’un désaccord entre ceux qui militent pour des droits égaux entre tous les citoyens quelle que soit leur orientation sexuelle, et ceux qui dénoncent les conséquences mortifères de cette pratique parce qu’elle accentue le manque de clarté de la filiation et des modèles familiaux et éducatifs dont disposeront les enfants dans le futur, sans compter le renforcement de la médicalisation de la gestation, avec son coût bioéthique et financier. Au moins, pourrions-nous dire, il y a eu débat et les différentes opinions ont droit de cité. Mais qu’en est-il de toutes les autres mesures qui sont en instance d’être entérinées en même temps, dans une grande discrétion, au moment où les citoyens français aspirent légitimement à des vacances dé-confinées ? 

 

Au fil des débats, certaines propositions ont enfreint des barrières éthiques lourdes, par exemple l’autorisation de créer des embryons chimères par injection d’une cellule souche humaine dans un embryon animal. S’agit-il d’envisager la fabrication ultérieure de telle ou telle protéine humaine par des animaux transgéniques (plutôt que des plantes) ? Dans ce cas, il est surprenant que la réflexion sur la protection animale (si virulente) ne soit pas sollicitée pour poser de justes limites ? Désire-t-on continuer certaines recherches en évitant d’utiliser des embryons humains ? Pour le moment, l’interdit résiste mais fragilisé par le protocole qui requiert sa confirmation au coup par coup par le directeur général de l’Agence de la biomédecine.

Or, même sans franchir la barrière symbolique de la création de chimères, les autorisations ciblées qui permettent l’utilisation d’embryons pour la recherche sont déjà une démission collective vis-à-vis du respect de l’intégrité de la vie humaine, ou des vivants plus largement, qui inclut celui de leur reproduction. Et n’y-aurait-il pas là la pression de la concurrence économique dans un contexte mondialisé, alors même que l’épidémie du Covid nous a fait prendre conscience que la primauté donnée à l’économie par rapport à la santé est lourde de conséquences à moyen terme ? Au minimum, on désirerait un débat citoyen. On voit aussi l’inconvénient de faire évoluer la loi de bioéthique au fil des besoins ressentis, au risque de masquer les enjeux essentiels. 

 

Ce sont toujours les plus vulnérables et les plus pauvres qui sont les premières victimes. Mais qui peut prétendre aujourd’hui être à l’abri de toute vulnérabilité ou précarité ? Et plus largement, notre gestion du politique n’est pas sans impact éducatif. Comment exiger le respect de l’autorité politique et d’abord de son intégrité physique, si ceux qui édictent la loi n’en font plus une priorité absolue ? S’il est juste de condamner celui qui introduit l’anarchie, nous devons, nous aussi, comme citoyens, balayer devant la porte de notre indifférence…